Les Noèmes de Lola

Sur les murs de ma ville s'étalent ces mots: "Mort au monde de n'y être né."

Je me fonds dans ces mots étranges, ces murmurants qui m'emmènent au matin du monde parmi les immortels et les mourants ou parmi les âmes des morts nés.

"Mort au monde de n'y être né."

Noirs sont ces mots qui à mon âme résonnent.
Mystère aux creux des m et des n aux creux des j'aime et des haines.
Morts mystérieux murmurants et sur le mur tracés.
Morts miséricordieux.
Matins millénaires.

N'être Dieu et en naitre homme.
Naitre au monde et en n'être mort.

Mort.
Au.
Monde.
De.
N'y.
Etre.
Né.

Laissez moi donc écrire sur les murs les tristesses de la ville!
Laissez moi étaler sous vos yeux nos douleurs en questions, nos hésitations en couleurs et nos convictions en clameur... quelque part!

Sous un pont... béton humide et froid.
Au pied d'une tour... béton humide et froid.
Sur le quai d'une gare... béton humide et froid.

J'ai décidé de publier plus de poèmes. Un bon exercice d'écriture! Ce sont deux tridents...

Encore ce grand froid
J'en frissonne
Et mes cheveux tombent.

Elles s'immiscent en moi
Les gorgones
Qui glacent rêves et mondes.

Effroi.

Des morts pour les tombes.

Voici quelques uns des vers d'un noème que j'ai écrit il y a très peu de temps. Les paroles, le rythme et les rimes me venaient alors que j'avais en tête un poème d'Aragon chanté par Jean Ferrat: Est-ce ainsi que les hommes vivent?

J'ai tenté l'absence, le départ et l'abstinence
J'ai tenté le silence, j'ai tenté les folies
Mais à genoux sur mes errances
J'ai beau prier avec vaillance
J'en meurs toujours aujourd'hui.

Et mes bras nus soudain tressaillent
Sous les caresses douces de la nuit
Qui au terme d'une bataille
Ce sont emparées de mes entrailles
Pour y loger la vie qui balbutie.

Etait-ce ou non drôle?
Mon texte, mon personnage, mon rôle
C'était de n'y comprendre rien.

Les tridents ce sont des poèmes de trois vers avec un nombre fixe de syllabes, en l'occurrence 5-3-5. Le résultat est très ludique et rythmé, et aussi assez mystérieux. C'est un exercice qu'on m'a proposé à un atelier d'écriture dont le thème était l'OuLiPo.

Mon corps a si mal!
Mes yeux tombent
Au fond des toilettes.

Mon cœur va si mal!
Mes vœux tombent.
Et sonnez trompettes!

Deux corps pour une bouche
Deux mains sur mes yeux
Trois errances qui s'effleurent, s'enlacent et se défont.
Petite.
Petite et si vieille. Ancestrale. Archaïque.
Ton savoir, ta sagesse.
L'immensité dans chacunes de tes paroles.

Et résonnent les prières antiques dans les accents de ta voix.
Ta main qui se soulève.

Et vive!

Vive les lueurs, les cristaux, les éclairs qui traversent nos yeux.

Le vent. Soulève.
Soulevant les montagnes qui fondent et s'éparpillent.

Au théatre Marni, suivi d'une soirée slam!

Manque de Sarah Kane

© Nikolas List

"He´s following me... He needs to have a secret but he can´t help telling

The heat is going out of me/ The heart is going out of me

And though she cannot remember she cannot forget

Clutching a fistful of sand

What ties me to you is guilt I crossed two rivers and wept by one I am the beast at the end of the rope

Happy and free"

Sarah Kane

Saisir sentiments ressassés.
Sourire, environnement saccagé.

Et poigne!

Par poignées, baisse tes affects, oui!
Par poignées rires infects.
Non sors de là, toi.

Sors et ouvre-toi!

De haut en bas,
Des yeux jusqu'au sexe
Béante
Beauté Béate?

Regarde-toi
Pitié plate tu me hantes...

Et poigne!
Le creux me vrille
Mes yeux en suintent de collante douleur.

Et poigne!
Sciée aux chevilles
Mes pieds en pointent vers un ailleurs.

Ailleurs, c'est ça!

Sur la rive je rame
Une rime rassure mes larmes
Un rêve récure mon âme.